March 9, 2009

Les mystères de la vie du ...... teneur de marché

Le billet ci-bas fut posté sur le blogue du Forum des économistes progresssistes en réaction au propos d'Henri Paul Rousseau devant la chambre de commerce de Montréal. S'il accepte le fardeau des pertes historiques de la Caisse, l'ex-dirigeant se permet tout de même d'invoquer des forces au-delà de son contrôle pour expliquer l'ampleur du dégât en 2008. Pourtant la question de l'importance des placements de la Caisse en PCAA non bancaire - au point où celle-ci détenait près de la moitié de ces titres en circulation au Canada - demeure pour lui un "mystères de la vie". J'ai tenté d'expliquer à mes camarades progressistes du ROC comment ici on peut parfois nous prendre pour des imbéciles et s'en tirer tellement bien que l'on peut ajouter l'insulte à l'injure.

The political crisis around the Caisse’s dismal performance continues to haunt the political scene in Québec. Urged to explain how up to 40 billion dollars might have been lost during his management Caisse ex-director Henri Paul Rousseau largely blamed the economic and financial crisis, factors beyond his control. Asked why and how the Caisse ended up with so much ABCP in its books in the weeks leading up to the credit crunch (more than half of non bank ABCP) Rousseau replied that it remains “one of the mysteries of life”.

Some mysteries are more easily solved then others.

When Rousseau was called to the helm of the Caisse by PQ Prime minister Bernard Landry (and self-styled third way social democrat) he explicitly underscored his desire to change the Caisse’s dual mandate from the active pursuit of economic development and financial returns to a new mandate inspired by financial market efficiency theory: what’s good for financial markets must be good for economic development. Armed with this new mantra Rousseau asked that the Caisse’s operations and investment decisions be “neutralised” politically and that the mandate to develop Québec’s economy and protect “Québec INC’s interests” be scrapped. It took a provincial election and the rise to power of the (neo) liberal party of Jean Charest for the mandate to be changed. Progressives and left wing nationalists have argued since that the Caisse has not only deserted Québec’s economy as a major investor, but that it has tacitly supported neoliberal policies such as P3’s.

What does this have to do with ABCP ? I’ve argued in the francophone press (an op-ed piece in the Devoir) and media that in fact the Caisse did have a new mandate of economic “development”. Given it’s size in Québec’s economy and in Canada’s financial system, a decision to limit the Caisse’s investment strategy to the pursuit of highest possible financial returns condemned the Caisse to develop Canada’s …. financial markets. The Caisse owned at least a 10% stake in Coventry, a major provider of non bank ABCP, it also controlled the Montreal exchange, who’s derivative activity is intimately tied to the development of non bank ABCP, and it works closely with National Bank, a major reseller and broker in the non bank ABCP market in Canada back in the good old days when these constructs where assimilated to highly liquid, highly secure, highly profitable “money market” instruments. All the evidence I’ve stumbled on seems to point to the Caisse acting as “market maker” in this situation, why ? Because developing this new segment was highly profitable in a context of low returns on stock, because it supported the Montreal exchange’s bid to become an important player in the derivatives scene, because it dovetailed with the National bank’s strategy, and on the whole the Caisse seemed, back then, to help Montreal’s insignificant financial district become a significant player again.

Progressives in Québec are arguing that in times of economic crisis and crunched credit markets the Caisse should be available as policy tool to help our beleaguered manufacturing sector weather the storm and more importantly lead with a public investment strategy our economy towards a greener and more socially sustainable growth. Instead the current government is thinking of having the Caisse finance P3’s that the private sector can’t fund... more of the same to come ?

March 8, 2009

La nouvelle Tembec : la fin d’un « modèle » québécois

Version modifiée d'un article paru dans le journal
Le Mouton Noir, nov.-déc. 2008.

Il y a maintenant un an, la forestière Tembec annonçait le bouclage d’un important plan de recapitalisation, plan qui consistait en une réorganisation de la structure financière de la compagnie afin « de garantir le maintien de ses opérations et d’améliorer sa valeur à long terme ». Aux yeux des analystes financiers, l’importante dette que Tembec avait cumulée à partir des années 1990, combinée à des perspectives de marché peu encourageantes, plombait le bilan de la compagnie et la gardait « au fond de la cour » : le titre de la compagnie, ayant été transigé à près de 18 $ en 2000, flirtait désormais avec les titres de pacotille, et le rétrécissement de ses marges d’exploitation rendait chaque jour plus imminente une crise de solvabilité et plus pénible le refinancement de ses emprunts. C’est pourquoi ce plan de recapitalisation a d’abord visé cet élément de la structure financière : c’est en effet la conversion d’une tranche de 1,2 milliard $ US de la dette de la compagnie en actions qui a été réalisée en février 2008. Au terme de cette transaction, ce sont 95 % des actions de la « nouvelle » compagnie qui allaient tomber dans le portefeuille de ses créanciers, les 5 % restants étant répartis proportionnellement entre tous les actionnaires précédents. La haute direction de la compagnie a présenté cette transaction comme une affaire technique, concernant essentiellement la structure du capital de la compagnie.

Or, plus qu’une simple manœuvre comptable, ce plan de redressement financier a sonné rien de moins que la fin d’un modèle d’entreprise et a initié de profonds changements au sein de Tembec, changements auxquels nous avons pu assister ces derniers mois. En effet, cette opération financière de conversion de la dette en titres de propriété a signifié que les créanciers américains auprès desquels Tembec avait contracté d’importants emprunts ces dernières années sont devenus, par la réversibilité des opérations d’ingénierie financière, les nouveaux actionnaires majoritaires de la compagnie. Cette opération a été majeure pour au moins deux raisons.

D’abord, parce que Tembec a longtemps été citée comme un « modèle » québécois de co-gestion d’entreprise, un modèle qui reposait sur la participation des employés au capital et à l’administration de certains aspects économiques de la firme. On se souviendra qu’après sa fermeture en 1972 par la multinationale CIP, l’usine de Témiscaming avait été rachetée par une partie de ses cadres et travailleurs, ce qui assurait en quelque sorte l’ancrage de l’entreprise dans la communauté. Cette originalité, qui s’était cependant atténuée au fil des ans, a été définitivement enterrée avec cette opération de recapitalisation, qui a fait passer le contrôle québécois du capital de Tembec entre les mains de la haute finance américaine. Même l’ancien p.d.-g. Frank Dottori et son ami Emmanuele Saputo, principal actionnaire de la compagnie avant l’entrée en vigueur du plan, se sont publiquement opposés à la transaction. Dans son édition du 20 décembre 2007, Le Devoir relatait en effet la réaction de Dottori à ce plan, qui était encore au stade de projet : « Je ne suis pas d’accord avec le fait de donner la compagnie à des investisseurs américains et de tasser, peu importe comment on le présente, des actionnaires-employés et des gens qui ont passé 20 ou 30 ans à bâtir l’entreprise... J’ai beaucoup de difficulté à accepter ça ». Deux semaines avant que Dottori ne tienne ces propos, Emanuele Saputo démissionnait de son poste au c.a. de Tembec et présentait un plan de refinancement « alternatif » à celui qu’avait conseillé BMO Marchés des capitaux à l’équipe de James Lopez, le nouveau p.d.-g. de Tembec. Cette alternative a cependant été rejetée, le haut management de la compagnie ayant manifestement décidé de saisir l’occasion offerte par ce plan pour refonder une nouvelle Tembec, en rupture avec l’héritage des années Dottori que cherchait à conserver l'offre de Saputo.

Il faut comprendre que ce plan de recapitalisation est important pour une seconde raison, corollaire à la première, soit qu'il a inauguré le début d’un nouveau modèle d’entreprise chez Tembec, un modèle basé sur la restructuration continue de ses activités productives. En effet, les nouveaux actionnaires de la nouvelle Tembec, au moment du bouclage de ce plan, n’étaient nul autres que trois fonds d’investissement spéculatifs américains – Wayzata Investment Partners, Bear Sterns Asset Management et Trilogy Capital – qui sont reconnus pour leur capacité à impulser des transformations majeures au sein de la direction des entreprises contrôlées. Faisant dans le hedge fund et le private equity, deux stratégies de gestion d’entreprise fondées sur l’augmentation substantielle des rendements financiers de la compagnie, ces trois nouveaux actionnaires font partie de la constellation des puissantes organisations financières qui se montrent très « pro-actives » face aux orientations des entreprises qu’elles détiennent. Cela signifie qu’ils n’ont probablement rien négligé pour que les décisions stratégiques prises par l’exécutif de Tembec soient conformes à leurs intérêts supérieurs de money managers, c’est-à-dire à la nécessité de maximiser les liquidités disponibles (par l’augmentation des flux de trésorerie et des marges d’exploitation), et de maintenir une bonne note de solvabilité de la forestière auprès des analystes financiers. Tembec est devenue pour ces organisations financières un « actif » parmi d’autres dans leur portefeuille de titres, un actif qui doit conserver une cote appréciable pour être éventuellement liquidé sur le marché.

Évidemment, parmi tous les moyens mis à la disposition de la direction pour satisfaire ces attentes et envoyer des signaux positifs à la communauté des observateurs financiers, les restructurations, les fermetures d'usines et la vente d’actifs ont constitué les moyens les plus simples en même temps que les plus efficaces. Dans le contexte actuel de la crise que traversent les majors de l’industrie forestière, l’arrivée de ces acteurs financiers à la tête de Tembec a coïncidé avec l’accroissement des rationalisations dont les bénéfices ont été, pour l’essentiel, canalisés vers les interfaces financières de la compagnie. Il se trouve en effet que la nouvelle Tembec, plutôt que de chercher à mitiger les effets de la crise de l’industrie sur les communautés au sein desquelles elle opère, a recouru à ces moyens « classiques » pour améliorer la liquidité de la compagnie : depuis l’entrée en vigueur du plan de recapitalisation il y a un an, les annonces de fermeture se sont bousculées, de l’usine flambant neuve d’Amos fermée en septembre dernier, à l’arrêt indéfini des opérations de l’usine de pâte de feuillus de Matane, en passant par les installations nec plus ultra de Pine Falls au Manitoba, appartenant à ses employés il n’y a pas si longtemps encore.
Par delà le fait que la situation financière de Tembec se soit (un peu) améliorée avec la recapitalisation, soulageant la corporation d’une dette dont les coûts de financement étaient devenus exorbitants, il semble que ce coup de barre aie aussi visé à habituer à des pratiques désormais « standards » chez Tembec : appliquée à un moment décisif de l'histoire de la compagnie, la médecine de choc administrée depuis quelques mois est probablement le signe le plus manifeste que le modèle partenarial développé depuis les années 1970 fera désormais place à des stratégies de gestion « collant » au plus près aux conventions produites par le marché, un marché maintenant structuré par de nouveaux acteurs financiers.

March 5, 2009

Caisse et Bourse de Montréal

Extrait du site du Globe and Mail:

The leadership contest at the beleaguered Caisse de depot et placement du Quebec just got a whole mot more interesting, as the widely respected Luc Bertrand stepped down Thursday as head of the Montreal Exchange.

After nine years at the helm of the successful derivatives exchange, Mr. Bertrand will leave the deputy CEO job at TMX Group in June. He was a candidate for the top job whe the Montreal and Toronto exchanges merged last year, but the board brought in an outsider, Thomas Kloet.

“I now feel that it is a good time for me to move on to other challenges and opportunities,” said Mr. Bertrand in a press release. As a proven manager with international experience, Mr. Bertrand is often mentioned as a candidate for the top job at the Caisse, which is in disarray after losing $40-billion in 2008, and seeing it CEO Richard Guay retire. Mr. Bertrand has declined to comment on whether he would want the job - current Caisse CEO Fernand Perreault is not in the running - and he would certainly have his pick of positions at financial institutions.

But for an executive with an interest in public policy – Mr. Bertrand's undergraduate degree from the University of Ottawa is in political science – the challenge of turning around the Caisse would be enticing.

Other candidates for the top job at the Caisse include Jean-Guy Desjardins, CEO and co-founder of Fiera Capital and TAL Global Investment Management, and Christiane Bergevin, the head of SNC-Lavalin's finance division and a Caisse director. Mr. Desjardins is in his mid-60s.