January 7, 2009

La crise et l'économie politique de l'overclass: un cas de thérapie de shock ?

"The upcoming federal budget needs immediate, permanent tax cuts to stimulate the Canadian economy, to be offset by tightening the reins on program spending in future years, several of Canada's top private-sector economists recommended Wednesday."
Report on Business

Toujours sans gène les économistes des grandes banques canadiennes plaident en pleine crise économique pour une combinaison de baisses d'impôt et de réduction des dépenses publiques comme un des éléments centraux d'un éventuel plan de relance. Faisant écho à Flaherty, s'ils reconnaissent la nécessité d'investir dans des projets d'infrastructure, l'emphase, selon eux, devrait être mise sur des baisses d'impôts permanentes.

Évidemment, font-ils remarquer, une telle mesure engendrerait un manque à gagner structurel dans les coffres de l'État et donc la solution qui s'impose ? Couper dans les dépenses de programme, qui selon nos banquiers augmentent, depuis 10 ans, à une vitesse démesurée car légèrement supérieure au taux de croissance du PIB.

Aucune mention du fait que cette progression des dépenses depuis dix ans (1998 - 2008) n'est en fait qu'un rattrapage nécessaire et d'ailleurs minimal de l'intervention de l'État après les coupures désastreuses des années 90 dans le cadre de la lutte au déficit. Nos dépenses publics / PIB sont encore largement inférieures au niveau moyen de l'OCDE et largement en deça des besoins de base d'une société décente. Pourquoi devons nous investir massivement en infrastructures actuellement ? Parce que nous n'avions pas les budgets pour les entretenir pendant la période de croissance néolibérale.

Et les baisses d'impôt personnel souhaitées ? Je n'ai pas de détails, mais il n'y a pas beaucoup d'options. Soit on baisse les taxes à la consommation de manière significative c'est-à-dire la TPS, cette baisse doit être significative pour avoir un impact économique, c'est-à-dire faire une impression psychologique sur les ménages pour qu'ils s'engagent dans une nouvelle ronde de surconsommation. Je doute que Flaherty envisage de baisser la TPS au chiffre symbolique de 3, 2, voire 1%. Et, comme plusieurs l'on souligné, une baisse des taxes de vente stimule autant si non plus l'achat de produits importés que de produits nord-américains. Donc l'effet de relance est mitigé.
Baisse de l'impôt sur les revenus, certainement, mais lesquels ?
On va certainement en profiter pour élargir les abris fiscaux liés au gain de capitaux et autres gain financiers, prétextant d'alléger le fardeau des ménages sur le seuil de la retraite ou des retraités. On va certainement en profiter pour alléger le fardeau fiscal des 10% les plus riches qui contribuent près de 50% de l'impôt sur le revenu, désolidarisants les plus riches de cette catégorie encore un peu plus du sort du reste de la société...
Car les heureux qui se compte parmi les 1% les plus riches (en terme de revenus) sortirons les grands gagnants d'une telle "relance", ce sont eux qui détiennent la plus grande part d'actifs financiers et ce sont eux qui bénéficirons le plus d'une baisse générale du taux d'imposition.

Bref, l'économie politique de l'overclass face à cette crise semble de plus en plus clair, d'un côté les ménages ordinaires doivent assainir leurs bilans et rétablir leur taux d'épargne, dixit Jacques Ménard du groupe BMO, dans la Presse du 28 novembre, des baisses d'impôt significatives et permanentes pour les plus riches afin de consolider le programme néolibéral de réduction de l'impôt que paie l'overclass an Amérique du Nord entrepris depuis 20 ans et finalement réduction des dépenses de l'État en programmes de manière à limiter encore plus l'emprise du publique sur l'économie et limiter encore plus les services destinés aux ménages salariés ordinaires.

Somme nous devant un cas de "Shock therapy" ?

Un retour à l'interdiction de l'Usure ?


En guise de réponse à nos banquiers je propose la mesure suivante: un rétablissement au Canada de la loi sur "l'usure". Le taux maximum qu'une institution financière peut charger à un emprunteur devrait être fixé sous la forme d'un écart par rapport au taux directeur de la banque centrale, et cet écart devrait être, compte tenu de la crise, fixé pour les personnes physique à 10%. Un taux supérieur serait fixé pour les personnes morales, c'est-à-dire les entreprises. Et pourquoi pas, une gamme de taux pourraient être fixés en fonction de différent types de prêts, toujours en fonction d'un objectif politique. Une telle "loi sur l'usure" pourrait en fait devenir une politique de "crédit dirigé" (mesures populaires dans les années 60 - 70 dans les pays en voie de développement et honni par le FMI) et un levier important de transformation politique de l'économie.

Pourquoi une telle mesure ?

1. parce que, j'oubliais de le dire plus haut, les banques demandent aussi que la Banque du Canada baisse plus drastiquement son taux directeur, or comme vous le savez les baisses de cet automne ne se sont pas traduites par des meilleurs conditions de crédit pour les particuliers et les entreprises, et les baisses souhaitées ne le seront pas non plus. C'est donc à l'État de lier son taux directeur aux conditions de crédit via un plafond imposé aux banques.

2. parce que si le problème est le taux d'endettement excessif des ménages ordinaires la seule façon de réduire ce taux sans causer un effet dépressif sur la demande est de diminuer le fardeau du financement. Outre augmenter les salaires, cela peut se faire par le biais d'une bonne vieille envolée inflationniste, deux scénarios peu probables actuellement, ou par le biais d'une baisse des taux d'intérêt, ce qui permet un remboursement plus rapide du capital et donc une progression du taux d'épargne.

3. les économistes de l'overclass réponderont que cela incitera les ménages ordinaires à se lancer de nouveau dans une course à l'endettement insoutenable. Évidemment quand les salaires stagne et on fait miroité des nouveaux objets de consommation afin de garantir un taux de profit la tentation est là. Un jour il va falloir trancher ! Mais d'ici là je crois qu'on peut compter sur les banques pour qu'elles continuent, tant que perdure la crise, à rationner le crédit et donc à limiter l'offre de crédit.

4. ils ajouteront qu'une telle politique de crédit dirigée aurait pour effet de faire fuire les banques et institutions financières étrangèrent et d'allonger le rationnement de crédit en plus d'avoir un impact désastreux sur leurs profits.
À cela on peu répondre, rapidement, car une vrai réponse demanderait plus d'élaboration:
a) la fuite des Citigroup, HSBC et autre MBNA du marché du crédit hypothécaire et du crédit à la consommation est déjà bien entammée, en plus cela laissera aux banques domestiques la possibilité d'augmenter leurs parts de marché perdues;
b) l'écart de taux de crédit fixé par une loi sur l'Usure viserait à minimiser la possibilité d'empirer le rationnement de crédit;
c) moins de 50% des revenus des banques proviennent de l'intérêt sur les prêts aux particuliers, la loi sur l'usure risque tout simplement de transformer leurs "surprofits" en profits.

Par contre, une telle mesure risque d'affecter sensiblement le marché de la titrisation de ces prêts en diminuant le taux de rentabilité de ces actifs et surtout des activités très lucratives liées à la titrisation, mais compte tenu du rôle de ce marché dans la crise, est-ce un si grand mal de voir celui-ci disparaître et les banques contraintes d'assumer pleinement leur rôle de créancières ?

1 comment:

Anonymous said...

Moi j'ai l'impression qu'on entre seulement dans la crise !